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mardi 16 octobre 2018

CNESER • 16 octobre 2018 • Déclaration CGT et projet d’ordonnance ESR

► CNESER • Séance du 16 octobre 2018
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Déclaration des élu·es et représentant·es CGT au CNESER

Madame la Ministre,

Le projet d’ordonnance sur les regroupements dans l’ESR, diffusé par la presse début septembre a été rédigé, une fois de plus, sans aucune concertation avec les organisations syndicales. Le CNESER pourra discuter avec vous sur ce texte mais, comme d’habitude, vous ne ferez aucun cas de nos avis. Ce projet est dans la droite ligne des lois précédentes de restructuration de l’enseignement supérieur et la recherche : LRU-Pécresse de 2007 et LRU-Fioraso de 2012, dont vous devez constater, comme nous, l’ampleur de l’échec. Il remplace fort utilement le cavalier législatif rejeté il y a quelques mois avec un seul objectif réel : faciliter les regroupements là où la résistance était trop forte (voir à Toulouse par exemple).

Nous sommes dans une logique de restructuration permanente et ce projet d’ordonnance qui va permettre aux composantes de l’ESR d’un site de déroger au code de l’éducation pour constituer un établissement expérimental par « regroupement ou fusion des établissements d’enseignement supérieur et de recherche dont des organismes de recherche publics et privés » va créer de l’insécurité pour très longtemps, et complétement bouleverser les conditions de travail de tous nos collègues. Ces établissements expérimentaux pourront déroger sur des nombreux points :

  • Plus de règle de la majorité absolue pour les délibérations statutaires,
  • Plus de limite d’âge à 68 ans pour les chefs d’établissements et plus de limite pour le nombre des mandats
  • Modification des modalités électorales des conseils centraux avec une diminution drastique de la représentation du personnel et des usagers au profit des personnalités extérieures, les modifications insérées dans la dernière version du texte sont largement insuffisantes.
    Cette ordonnance permettra l’entrée du secteur privé par des regroupements ou fusions avec les établissements de l’enseignement supérieur et les organismes de recherche.

Le projet permet une très grande autonomie dans la gestion des « ressources humaines ». Le texte dit que « les agents des établissements composantes peuvent exercer tout ou partie de leurs fonctions au sein de l’établissement expérimental ». Suite à l’alerte faite par notre organisation en bilatérale, une modification a été insérée (« dans le respect des dispositions statutaires qui leur sont applicables  »). Cela reste complètement insuffisant et ne nous rassure pas : ce texte aura valeur de loi et sera donc supérieur aux décrets statutaires. Il permettra de faire bouger les personnels d’un établissement à l’autre, d’un site à l’autre, du jour au lendemain, selon la volonté du chef d’établissement, sans aucun garde-fou (ni CPE , ni CAP, ni même la signature de l’agent.e).

Le projet prévoit que le recrutement des personnels sera subordonné aux décisions de l’établissement expérimental. Nous retrouvons ici la mise en application des recommandations du jury des Idex qui exigeait : « un droit de veto aux propositions de recrutement des enseignants-chercheurs, enseignants et chercheurs des institutions fondatrices ». Aujourd’hui nos craintes se confirment malgré les réponses qui se veulent rassurantes du Ministère. On peut faire le même constat concernant les recommandations sur « le droit d’auditer et d’amender le projet de budget prévisionnel de toutes les institutions fondatrices » ou le droit à attribuer des diplômes.

Les missions nationales des organismes de recherche EPST ou EPIC seront affaiblies par ces ordonnances. Votre discours est particulièrement inquiétant sur ce point. La gestion nationale de leur budget, du recrutement et la définition des objectifs de recherche au niveau national sont remise en cause. Après le projet de fusion entre l’IRSTEA et l’INRA, le Premier Ministre vient de saisir quatre inspections générales (IGAENR, IGF, IGAE et CGAAER) pour étudier un rapprochement entre les services du Cirad et de l’Inra d’une part et ceux de l’IRD-du CNRS-et des universités d’autre part. Les mots clés de ces rapprochements sont : rationalisation et mutualisation dont l’objectif est la diminution des emplois et de la masse salariale. Encore un dossier que le CNESER et les organisations syndicales apprennent par la presse. Au MESRI la CGT a interrogé ses interlocuteurs sur l’intégration des organismes de recherche dans les établissements expérimentaux. Il nous a été dit que c’est uniquement pour permettre à un organisme, l’IFSTAAR qui est localisé presque sur un seul site, d’intégrer un établissement expérimental. Pourquoi alors parler de tous les organismes de recherche ? Pourquoi ne pas vous limiter à l’IFSTAAR ?

L’objectif, sous couvert « d’expérimentations », est de se débarrasser de toutes les règles nationales gérant les établissements d’ESR. La période de 10 ans est particulièrement longue : en pratique, les « expérimentations » sont donc de vraies « règles » de fonctionnement pendant 10 ans, l’insécurité à long terme.

À l’issue de l’expérimentation, il n’y aura aucune évaluation contradictoire avec des représentants des personnels mais seulement un passage devant le HCERES. Les établissements expérimentaux pourront obtenir le statut dérogatoire de « grand établissement » et ainsi pérenniser leurs règles de fonctionnement locales.

Notre cadre et nos conditions de travail, déjà très dégradés après les fusions et regroupements, vont exploser : affectations multiples, désorganisation du travail, durée du travail à la hausse….

Le CNESER réuni le 17 septembre a voté à l’unanimité des organisations syndicales et étudiantes une motion pour demander le retrait du texte.

La CGT s’oppose sans réserve à ce projet d’ordonnance, inacceptable, qui provoquerait 10 années de restructurations supplémentaires, épuisantes et destructrices pour les personnels et néfastes pour le service public d’Enseignement supérieur et de Recherche : concurrence, compétition, explosion des cadres nationaux, inégalités territoriales et gouvernance lâchée aux personnalités extérieures c’est le modèle qui nous est proposé.

Nous réitérons les questions que les représentants de la CGT ont posées au MSRI :

  • Comment comptez-vous assurer aux personnels qu’ils ne seront pas déplacés du jour au lendemain ?
  • Comment comptez-vous assurer le respect de leur statut ?
  • Le recrutement des personnels sera-t-il subordonné aux décisions de l’établissement expérimental ?
  • La destruction complète de la démocratie universitaire permettra aux directions d’établissement de se ruer sur cette possibilité pour écarter les personnels et les usagers des prises de décisions qui les concernent. Que comptez-vous faire pour préserver la démocratie dans nos établissements ?
  • L’objectif est-il de n’avoir in fine dans l’ESR plus que des « grands établissements » dérogeant au code de l’éducation ?
  • Comment concilier la mise en en place de ces « universités de recherche » que sont ces établissements expérimentaux avec la nécessité d’une politique nationale de recherche ?
  • Et enfin, question fondamentale : les grands établissements sont dérogatoires, y compris pour les droits d’inscription. Comment comptez-vous garantir un cadrage national des droits d’inscription ? Quelles augmentations seront possibles et où ?

Avant-projet d’ordonnance relative à l’expérimentation de nouvelles formes de rapprochement, de regroupement ou de fusion des établissements d’enseignement supérieur et de recherche

Deux votes sont organisés.

  • Vote du texte avec les amendements : 0 pour, 54 contre (dont CGT) et 7 abstentions

Le Ministère annonce qu’il ne compte pas insérer les amendements au texte du gouvernement.

  • Vote texte sans amendements : 9 pour, 46 contre (dont CGT) et 8 abstentions
    ► Les élu·es et représentant·es CGT ont décidé de ne pas participer au vote des amendements sur ce texte qui n’est pas amendable.

► CNESER • Séance du 16 octobre 2018
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