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mardi 17 janvier 2006

Site web du syndicat CGT de l’université Aix-Marseille

Renouvellement des conseils - Notre profession de foi - 17 janvier 2006

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Aux dernières élections, nous débutions notre profession de foi par le paragraphe suivant :

“ la question centrale aujourd’hui pour les enseignants-chercheurs et chercheurs, dans le contexte d’une université de masse, est de préserver le lien indissociable entre enseignement et recherche. Ces deux activités qui assurent le rayonnement d’une université et des laboratoires de recherche associés, grâce aux productions scientifiques, à leurs diffusions comme aux enseignements prodigués, sont de plus en plus difficiles à exercer tant elles sont alourdies par la réalisation de tâches administratives qui résultent d’un sous-encadrement en personnel enseignant mais aussi IATOSS. ”

LE CONSTAT : UNE DEGRADATION CONTINUE DES CONDITIONS DE TRAVAIL ET DES MOYENS

Au terme de quatre années de participation aux conseils, les élus de la liste TNT ne peuvent que constater l’alourdissement des tâches et la dégradation matérielle des conditions de travail.

Prenons le simple exemple des cours en amphithéâtres : qui n’a pas connu la défaillance répétée des micros, la température glaciale, l’élégance de la pince à linge en guise d’attache des micros-cravates.

Pour anecdotiques qu’elles puissent paraître, ces conditions subies posent la question de l’amortissement du matériel nécessaire au travail pédagogique, et plus largement celles du financement de l’enseignement supérieur.

Alors qu’il est régulièrement fait appel au “ réalisme ” et à la “ responsabilité ” des personnels, peut-on dire qu’il est réaliste et responsable de faire de l’enseignement supérieur et de la recherche dans ces conditions ? D’autant que ce principe de soi-disant “ réalisme ”, ou d’amélioration de l’efficacité, à moyens constants, omet de questionner un fait fondamental : dans notre pays, le coût d’un étudiant de l’enseignement supérieur - tous établissements confondus - est inférieur de 1000 euros à la moyenne des pays de l’OCDE.

Vouloir accroître la “ concurrence ” entre universités, gage de “ compétitivité ”, et revendiquer dans le cadre d’une allocation de moyens aussi ridicule, l’ “ Europe de l’enseignement supérieur ” et “ les pôles d’excellence ”, c’est tout simplement se gargariser de slogans, ou pis encore, revendiquer pour soi ce que l’on retranche à autrui et qui pourra l’être à tout moment pour soi-même. Bref, c’est favoriser l’accroissement des écarts entre universités, entre services internes à celles-ci, entre UFR, entre disciplines.

En l’absence totale de principes clairs, explicites, débattus et publicisés des critères d’allocation des moyens (la question des postes aux niveaux national et local en est un bel exemple).

Voici pour le constat, quelques mots sur au moins une réforme en cours.

La Loi Organique relative aux Lois des Finances (LOLF) appliquée depuis le 1er janvier est, telle qu’elle est mise en œuvre par le gouvernement et dans le contexte de pénurie qui est le nôtre, une incitation à privilégier le calcul économique sur toute autre forme de rationalité : ainsi le budget correspondant à la paye des ATER est transféré du ministère aux universités.

Or, il est beaucoup moins coûteux d’embaucher un ATER à plein temps que deux ATER à mi-temps sur l’année (payés chacun environ 65% d’un plein temps), sans compter le fait que c’est également l’université qui devra payer leurs allocations chômage.

Le risque est grand de voir le nombre d’ATER se réduire progressivement : est-ce là le moyen idéal de constituer “ un vivier ” d’enseignants-chercheurs et de chercheurs ?
Ces dernières années ont été celles de la dégradation des conditions de travail, du développement de la précarité dans l’administration, l’enseignement et la recherche, du développement des tensions internes, de la souffrance au travail, mais aussi des relations de clientèles à tous les niveaux ; des instances démocratiques, porteuses des valeurs du service public, doivent et peuvent s’opposer à ces dérives.

Bien sûr, ces questions et leurs “ réponses ” sont largement à dimension nationale.

La solution résiderait-elle dans le doublement de certains services enseignants comme le proposaient les rapports Espéret puis Belloc ? Dans la diminution des frais de personnel comme le permettra la LOLF (l’amélioration des conditions matérielles de travail pourrait d’ailleurs se faire à ce prix, puisque le principe de fongibilité asymétrique permet de transférer une fraction de la masse salariale à des crédits d’équipement) ? Dans l’augmentation des droits d’inscription des étudiants, comme de nombreux rapports, en particulier d’économistes, le préconisent (des modèles proposent des droits d’inscription à 4 000 euros assortis de prêts d’un montant de 60 000 euros à taux zéro alloués sur cinq ans sous réserve de réussite aux examens, avec suppression des bourses et autres allocations) et de nombreux présidents d’université y songent ? Mais les capacités d’action et de traduction locales ne sont pas négligeables, d’autant qu’elles devraient aller en augmentant.

Le président de telle université, pilote dans l’expérimentation de la LOLF depuis 2005, a ainsi réuni tous les présidents de commissions de spécialistes de son établissement les incitant, en rappelant bien sûr leur souveraineté, à n’embaucher que des ATER à plein temps. Les universités grenobloises ont mis en place depuis cette rentrée un “ passeport pédagogique ” de 200 euros annuels par étudiant, passeport qui leur permet d’accéder à un certain nombre de services : salles informatiques, bibliothèque universitaire, etc., auxquels ils accédaient auparavant sans passeport ! Sommes-nous prêts à accepter ces modèles qui, - contrairement à ce qu’ils affichent : reconnaissance des investissements de tout un chacun, capacité d’action et adaptation au contexte local, autonomie, équité, - n’auraient d’autres effets que consacrer chez les enseignants-chercheurs la loi du plus fort et du plus tactique, et éliminer les plus démunis des étudiants ? Ce qui, chez les uns et chez les autres, est déjà suffisamment le cas aujourd’hui.

NOS PROPOSITIONS : TRANSPARENCE, NEGOCIATION ET TRANSFORMATION

Dans ce contexte, les termes de “ transparence ”, “ négociation ” et “ transformation ” gardent toute leur force et leur actualité.

Nous constatons toujours un déficit de Transparence dans le fonctionnement des trois conseils. Les débats diffusés de manière édulcorée plusieurs mois après les réunions, n’assurent pas les conditions d’une information claire et explicite sur les engagements de l’Etat envers les universités, et sur les décisions prises dans nos conseils.

Nous nous étions engagés il y a quatre ans à vous rapporter ces débats et décisions, et chacun a pu juger que nous avons tenu nos engagements pour les conseils dans lesquels nous avions des élus ; nous continuerons à le faire.

Mais la nécessité de transparence s’accroît avec l’élargissement de la capacité d’action locale. C’est pourquoi nous proposons la diffusion audio-visuelle, en direct ou en différé, des séances des trois conseils (hors conseils restreints).

Trop souvent les dossiers arrivent en conseil entièrement “ bouclés ” - sous couvert d’expertise - sous la forme de simples réponses à des nécessités d’ordre techniques et comptables ou de résultats d’analyses multicritères objectives.

Agir de la sorte, c’est occulter la dimension noble et politique de la décision, laquelle engage des choix de modèle d’enseignement, de recherche et de société.

Notre principe d’action est simple : à la soi-disant expertise technique drapée de neutralité, nous nous engageons à opposer la contre-expertise politique et la Négociation.

Notre objectif ne réside pas dans la simple dénonciation, mais dans l’analyse contradictoire du discours technique, afin de dévoiler et mettre en débats les choix politiques implicites que véhicule toute décision.

L’objectif de cette “ contre expertise politique ” se nourrit d’une volonté de propositions car la question qui nous engage tous est bien simple mais largement oubliée : quel enseignement supérieur voulons-nous, quel service public et pour quelle société ? De ce point de vue, l’information sur les choix budgétaires et les décisions du CA, demeure une de nos priorités.

L’Etat a-t-il respecté ses engagements en matière de Dotation Globale de Fonctionnement ? Les personnels IATOSS et enseignants chercheurs promis au titre de la campagne “Sauvons la recherche”, ont-ils été effectivement alloués aux universités ? L’externalisation de certains services, autrefois assurés par l’université, constitue-t-elle un réel gain et un gage d’efficacité ? Nous poserons aux instances dirigeantes de notre université la question du respect de l’engagement de l’Etat (et de son ministère), comme celle des choix en matière d’externalisation.

Nous poursuivrons notre vigilance critique, vis-à-vis des interprétations abusives ou zélées de la part de nos instances dirigeantes locales, des lois, décrets et circulaires produits au niveau gouvernemental (comme nous avons déjà pu le faire à propos du questionnaire LOLF enseignants-chercheurs) et vis-à-vis du développement de formes autoritaires dans les modes d’administration de notre université.

Enfin, un dernier constat s’impose : aux différents niveaux de la hiérarchie et jusqu’à la Présidence, nous courons tous, en tout sens, démultipliant efforts et projets, sans réelle reconnaissance du Ministère. Notre université ressemble trop à un bateau-fourmilière, ballotté par les vents, sans véritable feuille de route.

Les projets s’amoncellent : LMD, formations professionnelles, refondation des services, regroupement des trois universités, PRES.

Quand cesserons-nous d’être des élèves dociles bachotant toute leur vie un éternel concours (et qui, pour être performants dans toutes leurs activités, travaillent le plus souvent week-end et vacances), obéissant à toutes les injonctions aussi contradictoires qu’elles puissent être.

La précipitation et la logique de contrainte temporelle font partie d’une méthode de “ gouvernance ” éprouvée, qui fait de la démocratie un simulacre.

Notre éthique de la responsabilité et du service public s’en trouve dévoyée et détournée dans le plus grand mépris, au détriment de l’Université Française.

Ayons le courage de proposer un moratoire de manière à débattre sainement, publiquement et collégialement des hiérarchies et des priorités pour l’enseignement supérieur et pour notre Université.

Pour cela, redevenons ensemble, une force de débat, de proposition et d’action : une force de Transformation.