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Blog de la CGT FERC Sup Paris3
Il est temps de le reconnaître : le sous-encadrement des services centraux de l’université atteint un seuil critique. Les personnels n’arrivent pas à accomplir leurs missions premières, et encore moins à mettre à jour et à faire connaître les procédures indispensables au bon fonctionnement de l’université. De plus en plus de tâches sont externalisées, alors que les achats de prestations coûtent plus cher que le travail de fonctionnaires (pourtant tout à fait à même de les réaliser) et posent des problèmes de coordination avec les services supports. Enfin, le non-remplacement des enseignant·es-chercheur·es qui quittent l’université (on est passé de 441 EC et enseignant·es titulaires en 2018 à 425 en 2023 selon les chiffres des bilans sociaux) et le recours massif à des enseignant·es contractuel·es et des chargé·es de cours fragilisent le lien entre l’enseignement et la recherche et surchargent administrativement les titulaires restants, contraint·es d’assurer toujours plus de missions qui ne peuvent être confiées qu’à des personnels permanents.
L’origine des difficultés que connaissent les universités aujourd’hui, et la nôtre en particulier, est à trouver dans les politiques de destruction de l’emploi public menées depuis plusieurs décennies. Les gouvernements successifs n’ont cessé d’exiger une compression de la masse salariale des universités, tout en leur imposant de nouvelles charges. Les universités n’ont pas la main sur les emplois qui conditionnent toutes leurs activités : depuis la LOLF en 2006, l’Etat fixe des plafonds d’emplois de fonctionnaires. Et c’est maintenant aux universités de financer une partie des augmentations liées à l’ancienneté (le “glissement vieillesse-technicité”) ainsi que l’augmentation du point d’indice (dernière en date des mesures imposées). Plus récemment, au nom de la “soutenabilité budgétaire”, une nouvelle règle absurde définit une proportion fixe de dépenses salariales (83%) dans le budget des universités. Cela ne tient pas compte des spécificités des universités de lettres, langues, arts et sciences humaines, qui n’ont pas les gros postes d’investissement des laboratoires de médecine ou de sciences de la nature : elles ont donc besoin de moins de matériel, mais de plus de personnes pour assurer leurs missions. Or, elles n’ont droit qu’à… 2% de plus, 85% ! Et bien sûr, cet indicateur incite à externaliser et à gaspiller l’argent de l’État plutôt qu’à créer des emplois pérennes, son véritable objectif étant de réduire autant que possible le poids de la fonction publique.
Au manque de moyens s’ajoute une gouvernance des tutelles toujours plus irréaliste, inefficace et contre-productive, la gestion de l’indicateur de masse salariale n’en constituant qu’une des multiples illustrations. Dans un cadre déjà contraint, les personnels sont constamment sollicités pour des tâches qui les détournent de leurs missions essentielles, l’enseignement, la recherche et le fonctionnement global de l’université. Il faut préparer des “dialogues de gestion” avec les tutelles, des rapports d’évaluation, des réponses aux rapports d’évaluation, des procédures de labellisation. Il faut s’engager dans des “contrats d’objectifs, de moyens et de performance” qui sont très coûteux en temps et en énergie, et dont l’intérêt n’est pas démontré. A cela s’ajoute l’engagement dans des “partenariats” demandant un investissement conséquent sans davantage de temps et de moyens alloués. Cet empilement d’injonctions crée de multiples dysfonctionnements et de la souffrance au travail.
Ces difficultés sont de notoriété publique et compliquent le recrutement, particulièrement dans des domaines où les salaires de la fonction publique sont nettement moins élevés que dans le privé. De nouveaux collègues contractuels arrivent sur des postes vacants, puis repartent rapidement faute d’avoir pu être formés ou en constatant la souffrance des collègues en poste, qui font pourtant de leur mieux pour pallier le sous-effectif chronique. A la DNUM, alors que 43 agents figurent sur l’organigramme, et qu’il était prévu d’amener ce nombre à 51 à la fin 2023 pour faire face à l’accroissement du périmètre de ce service, seuls 36,5 ETP (emplois équivalent temps plein) sont effectivement pourvus. Quant aux services financiers, leurs difficultés se sont traduites cette année encore par une recommandation de non-certification des comptes, malgré tous les efforts des personnels. Il y manque environ un tiers des postes.
Les personnels ne peuvent en rien être tenus pour responsables de ces difficultés, ils et elles en sont les victimes. Or la gouvernance actuelle de l’université Sorbonne Nouvelle, certes favorable en principe au dialogue social, n’en a pas moins tendance à passer autant que possible sous silence les dysfonctionnements et leurs conséquences, et elle ne prend pas de mesures suffisantes pour y mettre fin. Si elle admet facilement, mais uniquement lorsqu’elle est interpellée, qu’il y a des problèmes importants, les réponses comme “ça va aller mieux” ou “on y travaille”, ne sauraient rassurer les personnels sur sa prise de conscience et ses préoccupations devant ces problèmes. Des déclarations fortes en ce sens seraient nécessaires, ce qui signifierait abandonner de temps à autre un optimisme de façade. Le souci de rayonnement et d’attractivité est légitime, mais il ne doit pas conduire à à inverser l’ordre des priorités qui devrait primer vu notre situation. Avant de répondre aux sollicitations tous azimuts des tutelles (université européenne, labels Human Resources Strategy for Researchers, etc.), il faut reconnaître et faire reconnaître par les tutelles la véritable origine de nos difficultés - le sous-financement de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche - et recentrer les ressources et les énergies sur nos missions essentielles.
C’est par sa capacité à assurer ses missions fondamentales d’enseignement et de recherche que l’université joue son rôle. Ces missions fondamentales sont clairement menacées actuellement, et il est plus que temps de l’admettre publiquement et d’agir en conséquence.
La CGT Sorbonne Nouvelle réclame :