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lundi 9 décembre 2019

Syndicat CGT Université de Grenoble

Communiqué de presse - droits fondamentaux en berne à l’UGA

Liberté d’expression

Mardi 3 décembre, la direction de l’UGA a envoyé le message suivant à toutes les Directions Générales Déléguées [1] :

Bonjour,

De manière générale et particulièrement dans le contexte de cette fin d’année, je vous rappelle, ainsi qu’à l’ensemble de vos services, que toute expression auprès de
journalistes locaux ou nationaux est proscrite sauf autorisation expresse de ma part ou de celle du Président. En qualité de fonctionnaire, nous ne sommes pas habilités à nous exprimer sans cet accord préalable quel que soit le sujet.

Merci d’avance pour votre compréhension.

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Université Grenoble Alpes

La liberté d’expression est un droit humain fondamental, protégé par l’article 10 de la convention européenne des droits humains, et l’article 11 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

La CGT Université de Grenoble dénonce cette attaque contre cette liberté fondamentale.

L’obligation de réserve n’est pas conçue comme une interdiction pour tout fonctionnaire d’exercer des droits élémentaires du citoyen. La liberté d’expression est d’ailleurs, expressément reconnus par l’article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

La CGT Université de Grenoble invite les journalistes, « locaux ou nationaux », à s’intéresser de très près à ce que pourraient avoir à dire les personnels de l’UGA.

Que craint donc notre direction ?

Que les personnels leur racontent les conditions de travail à l’UGA ? Les salaires bloqués, les différences de primes entre les directeurs et les autres agents ? Le rythme de travail effréné pour arriver à boucler « l’intégration » mal organisée en temps imposé (comme le souligne l’expertise CHSCT sur la création de l’UI) ? Les ras-le-bol de voir toujours plus de moyens partir dans les changements de logos alors que des bâtiments tombent en ruine, quand ce ne sont pas les collègues qui tombent d’épuisement ?

Instances représentatives du personnel

Au 1er janvier, avec la création de l’« Établissement Public Expérimental » (EPE) intégrant l’actuelle UGA, la ComUE UGA, l’INP, l’IEP et l’ENSAG, les instances représentatives du personnel (IRP : Comité Technique [CT], Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail [CHSCT], Commission Partitaire d’Etablissement [CPE]) disparaissent purement et simplement : contrairement à ce qui avait été fait pour la fusion et la création de l’UGA en 2015, cette fois-ci
aucune disposition transitoire n’a été prévue en attendant les futures élections prévues en avril prochain.

Trois mois sans IRP, trois mois sans organisations syndicales représentatives, trois mois sans représentants du personnel pour faire respecter les droits des travailleurs, au moment même de la mise en œuvre d’une telle réorganisation, encore accompagnée par des suppressions d’emplois de fonctionnaires et une précarisation à la hausse : quel patron n’en aurait pas rêvé ? Si en plus
on peut interdire au personnel de s’exprimer ou de parler aux journalistes, pourquoi s’en priver ?

Cependant, même les patrons doivent respecter certaines lois.

Par exemple, la constitution, qui dit dans son préambule (point 8) que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ».

Ou bien la directive européenne 89/391, article 11 alinéa 2 : « Les travailleurs ou les représentants des travailleurs, ayant une fonction spécifique en matière de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, participent de façon équilibrée, conformément aux législations et /ou pratiques nationales, ou sont consultés au préalable et en temps utile par l’employeur sur - a) toute action
qui peut avoir des effets substantiels sur la sécurité et la santé. »

À deux reprises, les représentants du personnel aux CHSCTs des différents établissements universitaires grenoblois ont obtenu une expertise sur les réorganisations d’ampleur successives (fusion vers l’UGA, puis intégration dans l’EPE). Ces expertises, de droit pour les CHSCT, ont été réalisées par le même cabinet agréé (Emergences).

Concernant la fusion en 2016, le premier rapport d’expertise préconisait notamment :

  • de redonner de l’autonomie aux agents ;
  • de parer au risque d’appauvrissement du contenu du travail ;
  • de revoir la structure organisationnelle rigide ;
  • de mieux évaluer la charge de travail des agents ;
  • d’identifier le personnel encadrant en souffrance et réduire la pression politique exercée sur l’ensemble des encadrants.

Le second rapport, rendu en octobre 2019, sur la construction de l’EPE, pointe un certain nombre de risques sur les conditions de travail :

  • Les caractéristiques elles-même du projet : projet mené par les responsables politiques auto-investis qui vise à répondre à la politique ministérielle (dont l’IDEX et la visibilité internationale) ; un projet dont le sens ne semble pas susciter l’intérêt et donc l’adhésion des personnels et questionne les cadres sur sa mise en œuvre et les moyens associés.
  • Une mise en oeuvre du projet d’EPE déficiente sans bilan fait sur la précédente fusion ;
  • Une centralisation du pouvoir, déshumanisation du travail, pression accrue sur les composantes.
  • Comme lors de la précédente expertise, le rapport met également en garde sur la charge de travail très lourde qui pèse sur les encadrants en DGD ou en composante.

Page 36 du rapport, un·e des cadres auditionné·e pour l’expertise évoque la concertation menée au pas de charge, et l’absence future des IRP : « Là, quand la direction nous dit maintenant qu’on ne va pas consulter encore les personnels dans trois ans et que pendant 6 mois, les syndicats ne pourront rien faire car on est expérimental, on pourra faire ce qu’on veut, on est sur le fil là ».

Pour la première fois de nos longues carrières pour certains, nous ne pourrons plus représenter les personnels pendant plus de 3 mois. L’administration nous assure que nous serons consulté·e·s, mais pour y faire quoi exactement ? Donner du crédit à la vitrine de cet EPE, comme quoi nous participons à la QVT (qualité de vie au travail), et que l’administration la main sur le coeur puisse dire : les représentants des personnels étaient présents ! Posons-nous la question de cette temporalité, n’est-ce pas bien vu de la part de nos dirigeants ? Être en freelance à cette
période va profiter à qui ? Aux personnels ? Certes non, les IRP inexistantes, n’importe quelle décision de notre direction pourra être appliquée sans aucun contre pouvoir : nous serons donc en mode “49.3” permanent, et nous ne pourrons qu’être spectateurs. C’est inédit et il est hors de question que nous nous transformions en épouvantail, présents certes mais inefficaces : ce n’est pas envisageable pour la CGT Université de Grenoble...

Nous avons demandé à plusieurs reprises que toutes les IRP soient prorogées. En l’absence de réponse favorable ou d’action engagée par l’université, la CGT Université de Grenoble a déposé lundi, par l’intermédiaire de ses représentants du personnel, une alerte pour « danger grave et imminent » concernant la suppression prochaine de ces instances pour faire respecter les droits fondamentaux des travailleurs de l’université.


[1DGD, englobant tous les services centraux de l’université