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Menu ☰Accueil > Les dossiers > Luttes en cours > Enseignement supérieur et recherche > Rémunérations des vacataires des universités : il est temps de payer !
Cette tribune publiée dans Le Monde du 26 mars 2026 fait le point sur la campagne vacataires lancée par le collectif doctorant de la CGT : de nombreuses actions réalisées, une stratégie juridique bien lancée, et déjà 15 000 € récupérés aux universités qui rechignaient à verser des salaires… Pour que cette campagne puisse prendre encore de l’ampleur, il faut la relayer et l’alimenter en donnant à la cagnotte de lutte !
En 2017, une circulaire du ministère de l’enseignement supérieur affirmait que les délais de paiement des vacataires d’enseignement, dépassant parfois les six mois, « ne sont pas acceptables au regard des principes généraux des finances publiques en la matière ». Depuis 2020, la loi de programmation de la recherche (LPR) prévoit le versement mensuel des rémunérations des vacataires.
Sept ans après la circulaire et quatre ans après la LPR, les vacataires ne perçoivent toujours pas leur rémunération à temps, et ces délais dépassent régulièrement les douze mois. En 2022, le ministère a même recommandé aux établissements de ne pas appliquer la loi, dans une circulaire heureusement annulée par le Conseil d’État suite à un recours de SUD éducation.
Recruté·es pour effectuer une charge d’enseignement ponctuelle, rémunéré·es à la tâche et ne disposant pas de réel contrat de travail, les enseignant·es vacataires sont souvent des jeunes chercheur·euses ou des personnes extérieures au milieu universitaire, ayant peu ou pas de revenu en dehors de cette activité.
Aujourd’hui, le recours à ce mode de recrutement explose : en 2022, on dénombrait 170 000 vacataires, soit 30 % d’augmentation en 7 ans. Ces vacataires ont effectué 5,6 millions d’heures d’enseignement dans l’année, soit l’équivalent de 29 000 enseignant·es-chercheur·euses à temps complet, sur les 55 000 en fonction ! Le 22 octobre, un article du Monde alertait d’ailleurs sur le fait que le manque de moyens de l’université favorise le recours massif à ces emplois précaires.
L’enseignement supérieur repose ainsi en grande partie sur le travail effectué par ces agent·es privé·es de tous les droits des contractuel·les et des fonctionnaires, y compris le plus fondamental : être payé·e en temps et en heure.
Payée à la tâche, la rémunération de ces personnels est en fait bien inférieure au SMIC, l’heure d’enseignement, fixée à 43,50 € brut, ne prenant pas en compte le temps de préparation ou de correction des copies, estimé à plus de 4h10 par heure enseignée.
Ces dernières années, la Confédération des Jeunes Chercheurs a mis en lumière leur situation alarmante, notamment en publiant le Guide des droits de l’enseignant·e vacataire. Par ailleurs, un travail actif de défrichage des données disponibles et de veille juridique a pu révéler l’étendue du vide juridique dans lequel sont plongé·es ces vacataires, qui permet, par une astuce comptable, d’escamoter au moins 15 000 emplois dans le budget de l’État tel qu’il est présenté aux parlementaires.
Après tant de sombres constats, il est temps de relever la tête. Nous en avons assez de nous épuiser à négocier, quémander, patienter, pour obtenir des miettes. Bien sûr, il faudra remettre en cause le principe même de ce statut de vacataire. Mais quant au simple respect de la loi, nous ne gaspillerons plus nos forces à écouter les arguties des directions : nous mettrons en demeure nos établissements employeurs de se mettre en conformité, par des recours juridiques s’il le faut. Nous appelons tous·tes les enseignant·es vacataires à faire de même, en contactant leur syndicat pour réclamer leur paye en temps et en heure, et à s’organiser collectivement pour faire respecter leurs droits.
Plusieurs organisations syndicales (le collectif doctorant·es de la CGT FERC, SUD éducation...) ont mis sur pied des dispositifs d’accompagnement juridique et syndical complet pour rendre ces recours simples et efficaces pour tous·tes les vacataires qui le souhaitent. En quelques mois, quatre recours ont déjà permis le versement de 12 550€ de rémunérations impayées (auprès des universités Paris 1, Paris Nord et Paris-Cité). Nous avons les moyens de contraindre les établissements, alors si vous êtes vous-même vacataire, n’hésitez plus. Pour nous aider à inverser le rapport de force, une cagnotte est disponible, afin de recueillir les dons dédiés au financement des recours individuels.
Il n’est plus acceptable que les enseignant·es vacataires soient la variable d’ajustement des politiques d’austérité, qui sacrifient d’une main les droits élémentaires de certain·es, pour mettre en scène une prétendue « excellence » de l’autre. Allouer les moyens nécessaires à la bonne marche du service public d’enseignement supérieur est un « devoir de l’État » inscrit au préambule de notre constitution. C’est ensuite la responsabilité des établissements de veiller à ce que la répartition de ces moyens aille d’abord au respect de leurs obligations légales. Si ce fonctionnement régulier est rendu à ce point impossible par l’explosion du nombre de vacataires et la faiblesse des services administratifs des universités, c’est donc que la transformation d’un nombre substantiel de ces vacations en emplois titulaires et contractuels s’impose, pour tout simplement maintenir les établissements ouverts.