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jeudi 30 octobre 2025

Rencontre avec le ministre : la faillite de l’ESR

Nous avons rencontré Philippe Baptiste, le ministre de l’ESR (Enseignement Supérieur et Recherche) ce lundi 27 octobre 2025.
Dans les attaques particulièrement violentes contre tous les services publics, déclinées dans le projet de budget 2026, deux constats spécifiques à l’ESR s’imposent, qui ne font que conforter notre analyse.

Les personnels de l’ESR sont traités comme des agents publics de seconde zone

En effet, dans la continuité des années précédentes, le projet de budget 2026 ne prévoit pas d’abonder la totalité de la masse salariale des agents de l’ESR, avec un désengagement croissant et touchant de plus en plus de mesures RH pourtant décidées par l’État lui-même. Cette fois, même la sacro-sainte LPR, tant vantée par le gouvernement et certaines organisations syndicales, n’y échappe pas.

Seulement 50M€ pour la LPR, bien en dessous de l’évolution promise, ce qui ne permet pas de couvrir l’ensemble des mesures prévues en 2026. Si les primes des jeunes chercheurs, l’échelon HEB pour les CRHC, le repyramidage CR-DR, et les mesures pour les doctorants sont maintenus, la revalorisation des primes initialement prévue pour les chercheurs par paliers successifs ne sera pas assurée. Cela laisse craindre que la cible pour la prime prévue à 6400€/an en 2027 ne sera pas tenue, alors même que le ministre fait le choix de maintenir les chaires de professeurs juniors.

Le taux de cotisation au CAS pensions, réhaussé de 4 points cette année, devrait être compensé à hauteur de 40% seulement.

Cerise sur le gâteau, il n’y a à ce jour aucune assurance que l’État prenne en charge le coût de mise en œuvre de la Protection Sociale Complémentaire (PSC), dénonçant ainsi l’accord initial. Pire encore : alors que nous étions déjà le dernier secteur de toute la Fonction publique à mettre en œuvre la complémentaire employeur, le ministère annonce sous couvert d’autonomie, qu’il laisse la main aux établissements pour une mise en œuvre "avant décembre 2026", remettant donc en cause le déploiement qui devait être effectif à compter du 1er mai 2026.

Tout ceci met en évidence le désengagement continu de l’État, qui ne prend plus la peine de financer les mesures RH pour les personnels de l’ESR qui relèvent pourtant de la fonction publique d’État. Le ministre de l’ESR justifie cette forfaiture par le fait que les agents sont employés par des opérateurs autonomes. Il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’opérateurs de… l’État, avec des règles statutaires décidées et engageant… l’État.

L’ESR est la variable d’ajustement de Bercy

Le projet de budget 2026 est un « musée des horreurs » pour les travailleuses et les travailleurs ; il confirme et amplifie encore le soutien à la rente contre le travail. En face des 211 Md€ d’aides publiques aux entreprises, en l’absence de taxation des ultra-riches, il n’est toujours pas question d’investir dans l’ESR public. Ni pour les formations, ni pour la recherche, ni pour les personnels, ni pour le bâti.

Bien au contraire, les solutions proposées par le ministère prônent :
  l’assèchement des fonds de roulement des établissements, alors que 80% des universités étaient en déficit l’an dernier, et que la trésorerie disponible des organismes de recherche s’épuise du fait des ponctions récurrentes imposées par les gouvernements successifs ; les fonds de roulement disponibles devraient au contraire servir à investir dans la rénovation des bâtiments, souvent dans un état déplorable ;
  le développement accru des appels à projets, alors qu’on connait le gâchis de temps, d’argent et de compétences que ce système engendre ;
  la contractualisation des moyens avec la mise en place des COMP 100% dans les universités, ce qui accentuera la logique néo-libérale déjà à l’œuvre ;
  la "régulation" de l’ESR privé, alors que l’ESR public est exsangue ;
  le développement des ressources propres, via le mécénat ;
  "l’assouplissement" de la rémunération des personnels ;
  l’augmentation des frais d’inscription.

En clair, non seulement l’État refuse d’investir dans l’ESR, mais il renie ses propres engagements, imposant ainsi aux établissements et aux organismes, de compenser sa désertion. C’est inacceptable !
C’est l’avenir de la jeunesse et du pays tout entier que le gouvernement est en train d’hypothéquer.