"Pour un Service public national d'Enseignement supérieur et de Recherche laïque, démocratique et émancipateur"

Menu ☰

Accueil > l’Echo du Sup > Echo du Sup N° 7 - Dossier "L’enseignement supérieur privé" > Le SNPEFP : Syndicat National des Personnels de l’Enseignement et de la (…)

vendredi 21 février 2025

Le SNPEFP : Syndicat National des Personnels de l’Enseignement et de la Formation Privés

Rencontre avec Christine Fourage, Secrétaire Générale du SNPEFP

C’est donc le syndicat CGT des personnels de l’enseignement supérieur privé lucratif (ceux des établissements rattachés à la convention collective de l’enseignement privé indépendant), en particulier les personnels des « universités » catholiques, des écoles privées d’ingénieurs, de commerce, d’art, de mode et de création en général, des BTS privés, des Formation en « Mastères » (qualifiantes mais pas diplômantes), établissements qui, par ailleurs, mélangent toute sorte de publics : en formation initiale ou continue.

Syndicat national, le SNPEFP fonctionne en sections locales, mais regroupe également de nombreux syndiqué·es isolés, en raison de l’éclatement des structures. 45% des adhérent·es relèvent de l’enseignement privé indépendant (dont 80% dans l’enseignement supérieur privé), le reste relève de la formation. A noter une particularité : 10% des syndiqués du supérieur privé sont anglophones, ce qui a conduit le syndicat a créer un groupe d’action spécifique.

Situation des personnels et conditions de travail

Un premier constat : la croissance forte, stable et soutenue du nombre d’étudiant·es dans ces écoles s’est accompagnée d’une précarisation de masse et d’un recours plus intensif à des contrats courts pour la majorité du personnel enseignant. Les CDD d’usage (pourtant réservés en principe à des activités temporaires - les « extras » dans l’hôtellerie par exemple) sont utilisés à répétition pour éviter de recruter en CDI. Les CDI, quand il y en a, sont généralement modulables, CDII ou CD2I, c’est-à-dire un CDI « Intermittent », contrat répondant en principe à des besoins permanents, mais dont l’activité ne permet pas de fixer avec précision les périodes de travail et la répartition des heures de travail.

Les emplois du temps sont d’abord construits selon le nombre d’étudiant·es avant de réfléchir à la répartition des heures entre enseignant·es, qui peuvent ainsi se retrouver avec plus de 700h de face à face / an ou au contraire avec très peu d’heures.

Aux ordres des financiers, tout doit être fait pour réduire la masse salariale au nom du regroupement des services et de leur « mutualisation » et le nombre de CDI et CDII pour les enseignant·es. On utilise alors encore d’autres subterfuges : statut de micro-entrepreneur, portage salarial ; avec ces artifices, certains organismes d’enseignement supérieur privé n’ont plus que des « prestataires extérieurs » parmi leurs enseignant·es.

Par ailleurs, les enseignant·es-chercheur·es salariés de ces établissements rencontrent d’immenses difficultés quant à l’exercice de leurs activités de recherche : essentiels dans la communication de leurs employeurs vis à vis des clients, mais aussi vis à vis du MESR (il faut des enseignant·es qualifiés pour obtenir un grade ou un visa de l’Etat, mais aussi pour attirer les étudiant·es), ils reçoivent l’obligation de s’associer à un laboratoire de recherche du public et d’y publier, mais sans qu’aucun moyen financier ne leur soit alloué pour le faire. Quant aux doctorant·es, corvéables à merci, ils ne se voient proposer que des CDD d’usage ou un CDD de mission pour les plus chanceux, et sont surchargés de cours par les écoles.

Il est par ailleurs extrêmement difficile aux enseignant·es salariés de se voir reconnaître un statut de cadre, malgré leur qualification, en général à Bac + 4 et plus.

Télétravail et enseignement à distance

Dans la recherche effrénée au profit, tout comme les CDI, le « présentiel » est jugé trop coûteux. Sous couvert de « transformation digitale », nombreuses sont les écoles à s’engouffrer vers des formations en « bi-modal » ou « comodal », et de nouveaux concurrents tentent l’aventure du tout numérique jusqu’à réduire l’existence physique de l’entreprise à une boîte aux lettres. Idem pour les personnels, tous les motifs sont bons pour forcer le passage en télétravail (des températures extérieures basses, des problèmes de transport ou des mouvements sociaux, par exemple) : cela permet de dupliquer les cours à l’infini, ce qui entraîne des pertes d’heures pour les enseignant·es. Ainsi, dans la même logique, les cours de langue disparaissent de plus en plus et sont remplacés par des cours sur des plateformes d’enseignement de langues, à distance, souvent installées à l’étranger.

Activité du syndicat

De par la nature même des employeurs concernés et la précarisation à outrance, le syndicat a une activité contentieuse très importante, autour des questions de requalification des CDDU en CDI, de microentrepreneur en salarié, par exemple, mais également autour des questions de représentativité des personnels : les désignations de délégué·es syndicaux sont souvent contestées par les employeurs, les entreprises du secteur pratiquant de nombreuses et fréquentes modifications juridiques autour de leur périmètre. La multiplication des dérives visant à diminuer le nombre de salariés (portage salarial, prestataires extérieurs, micro-entrepreneurs...) rend très compliqués les calculs des effectifs pour seuil des CSE, l’idée étant de ne surtout pas atteindre le seuil de 50 qui donnerait plus de pouvoir aux représentant·es du personnel et surtout limite au maximum la création de collectifs de travail, donc de collectifs syndicaux et l’attribution de droits aux représentant·es du personnel.

Par ailleurs, l’enseignement supérieur privé lucratif est un véritable laboratoire d’exercice des ordonnances Macron de 2018 : les NAO dans le secteur sont de véritables mascarades, tous les accords sont négociés au moins disant des conventions collectives ou du Code du Travail.