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Accueil > l’Echo du Sup > Echo du Sup N° 7 - Dossier "L’enseignement supérieur privé" > Institut Catholique d’Études Supérieures, De Villiers for ever ?

lundi 24 février 2025

Institut Catholique d’Études Supérieures, De Villiers for ever ?

François Poupet, CGT FERC Sup syndicat de Nantes Université

Depuis plus de trente ans, les collectivités territoriales des Pays-de-la-Loire, de la Vendée, et de l’agglomération yonnaise arrosent à coup de millions d’euros l’institut catholique de l’enseignement supérieur voulu par Philippe De Villiers… piétinant au passage les principes de la laïcité.

Il était une fois…

Au milieu des santons réactionnaires et des crèches bien chrétiennes, un bon vicomte, Philippe De Villiers eut le projet de ré-inventer la Vendée… Ce fut d’abord, à la fin des années 70, le Walt Disney du pauvre, le Puy du Fou, parc d’attraction bien huilé pour faire essaimer un récit populiste et fallacieux d’une province assiégée par la République. Installé dans le bocage, il avait pour finalité de faire prendre des vessies pour des lanternes : une guerre civile pour un génocide, une Vendée déchirée entre Républicains et royalistes pour une contrée uniquement peuplée de réactionnaires. Le pire, c’est que ce récit, tissu de mensonges historiques, a très bien marché : le Puy du Fou est un succès économique. Deuxième pièce du puzzle, « notre bon maître » décide de pousser ses pions en termes idéologiques. Avant qu’il ne devienne Président du conseil général de Vendée, il avait été acté que la collectivité prendrait en partie à sa charge le développement d’un centre universitaire départemental public (50 % de l’investissement et du fonctionnement), à la Roche-sur-Yon, préfecture du département. C’est là une occasion de dynamiser l’agglomération et tout le territoire. De Villiers reprend à son compte cet engagement (pouvait-il faire autrement ?), mais…demande en retour à ce qu’il puisse créer un institut catholique dans la même ville [1]. Un marché de dupes !

Dans cette croisade pour l’enseignement privé, il est aidé par le Recteur de l’académie de Nantes [2] de l’époque, vendéen, ancien élève du privé, devenu par la suite président du comité exécutif de la fondation ICES. Relié d’abord à l’UCO d’Angers, l’ICES devient progressivement « autonome ». Mais pas pour les subventions publiques qui pleuvent dans son escarcelle ! Privé, d’accord, mais pas de fonds publics ! on vit sur la bête !

Miracle, de l’argent !

Alors, comment fait-on vivre un institut privé ? Eh bien, avec beaucoup d’argent public [3]
 !

Fonctionnement
Le conseil départemental ? 2,3 millions d’euros chaque année.
L’agglomération yonnaise ? En 2023, 180 900 euros. Le maire actuel de la ville idolâtre De Villiers [4].

L’État participe à hauteur de 11% au budget (en 2015, il était de 7,4 millions d’euros, donc la somme investie annuellement par l’État était de 810 000 euros).

Investissement
Le conseil départemental et le conseil régional donnent presque 500 000 euros chaque année en remboursements d’emprunts (pour les travaux de l’ICES, son extension récente).

Les locaux de l’ICES font l’objet d’un bail emphytéotique [5], quasiment gratuit.

Résumons-nous : plus de 3 millions d’euros de subventions publiques chaque année.

Une gentille petite « université » pour de gentils petits étudiant·es…

L’ICES est un nid douillet pour…la réaction vendéenne, voire l’extrême-droite, qui jouit de l’argent public pour s’épanouir au soleil vendéen. Son fondateur n’en faisait pas mystère, en faisait son titre de gloire [6] : « identité, racines chrétiennes, patrimoine », le saint crédo de De Villiers. Il peut se vanter de sa réussite, la « zemmourisation » est bien à l’œuvre au sein de cet institut ; un sondage à l’interne, en 2022, en offre la parfaite illustration. Avant le premier tour des présidentielles, 38,6 % des étudiant·es interrogés souhaitaient voter Zemmour [7]. Ah, les braves petit·es que voilà [8] ! On leur donnerait le bon Dieu sans confession !

Mieux, ces jeunes gens éclairés par les lumières vendéennes flirtent sans vergogne avec tout ce que l’extrême droite fait de mieux : homophobie, racisme, haine de la République, royalisme assumé, … Entre autres exploits, une douzaine d’entre eux saccagent en 2019 un stand LGBT implanté sur la place centrale de La Roche-sur-Yon.

Mais, rassurez-vous, cela n’empêche pas ce joyau de la réaction d’être reconnu par l’État, en 2014, comme participant aux missions de services publics de l’enseignement supérieur français… D’avoir intégré en 2023, le réseau de la conférence des grandes écoles (CGE). D’être membre du programme ERASMUS. De passer vaillamment les évaluations HCERES [9].

Décidément, il y a quelque chose de pourri dans notre « royaume » de France !