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jeudi 16 mai 2019

Syndicat CGT FERC Sup Université de Pau et des Pays de l’Adour (UPPA)

Fonction publique : un peu de vérité ne fait pas de mal

Épisode 1 - Le nombre d’agents et son évolution

Un jour, on nous parle de 5,6 millions de fonctionnaires, le lendemain de 5,8. Le même jour de 6 millions.

Tous ces chiffres sont fantaisistes

Il y a 5,45 millions d’agents dans les 3 versants de la Fonction publique (État, Territoriale et Hospitalière). Dans cet ensemble, les fonctionnaires civils sont 3,85 millions, les militaires 0,3 million et les contractuels, ouvriers d’État, médecins hospitaliers, etc. (qui ne sont pas des fonctionnaires) 1,3 million.

Les mêmes nous affirment que l’emploi dans la Fonction publique a explosé ces dernières années, se bornant à mettre en avant, brut de décoffrage, les évolutions d’effectifs comme si le nombre d’emplois dans la Fonction publique ne devait pas être corrélé à celui de la population et de la population active. Or, dans le premier cas, sur les 20 dernières années, on est passé de 82 agents pour 1000 habitants à 86 pour mille aujourd’hui et, dans le second (la population active), de 18,8% des emplois à 18,9 % !

En outre, s’agissant du nombre d’agents dans la Fonction publique, rappelons que la France se situe au 9ème rang européen pour 100 habitants, au 13ème rang pour la population active et au 10ème rang pour 1000 kilomètres carrés.

Enfin, l’OCDE relève que, sur l’ensemble des emplois publics, la France se situe légèrement en dessous de la moyenne des 35 pays qui la constituent.

Alors, explosion incontrôlée des effectifs, vraiment !!??

Épisode 2 - Le grand n’importe quoi sur les retraites

Sous couvert d’équité, un certain nombre de ténors politiques ne cessent de nous fredonner la chanson de la fin des régimes spéciaux, ceux-ci constituant, à les entendre, des privilèges insupportables. Mais, une fois de plus, la réalité est bien différente de ces péremptoires affirmations émanant de celles et ceux qui, le plus souvent, sont les véritables privilégiés du système.

Les fonctionnaires partaient à la retraite, en moyenne, à 57 ans et 5 mois en 1990. En 2017 c’est à 61 ans et 2 mois.

L’écart avec les salariés du privé s’est réduit de 3 ans et n’est plus que d’un an et demi aujourd’hui, cet écart se justifiant par la plus forte proportion de métiers reconnus pénibles dans la Fonction publique.

Le taux de cotisations salariales est passé de 7,85% en 2010 à 10,29% en 2017 et atteindra 11,10%en 2020, identique aux salariés du secteur privé.

Pour la Fonction publique de l’État, en euro constants, la retraite moyenne mensuelle est passée de 2.293 euros en 2002 à 2.156 euros en 2017. Autrement dit, en travaillant plus longtemps, en cotisant beaucoup plus, les retraites ont baissé de près de 6% en 15 ans !

Pour tout à fait en finir avec les supposés avantages des fonctionnaires, rappelons que le Conseil d’orientation des retraites en 2013 (p.45) estimait les taux de remplacement médians à 74,5% pour les salariés du privé et à 75,2% pour ceux de la Fonction publique. Et d’ailleurs une très récente étude de l’INSEE (p.26) montre que l’application des règles du privé aux fonctionnaires conduirait dans 53% des cas à une retraite plus favorable pour les fonctionnaires. Cette même étude précise : « il y aurait, dans tous les cas, peu de sens à réduire la question à celle de l’identité ou de l’uniformité des règles, puisque des règles identiques appliquées à des publics différents ne sont pas toujours une garantie d’équité, tandis que, à l’inverse, une diversité des règles n’implique pas nécessairement des inégalités de retraite ».

C’est bien ce que pense la CGT qui est favorable à une élévation des droits pour tous avec le maintien des régimes spéciaux.

Épisode 3 - Temps de travail : rétablir les faits

Autre passion de nos libéraux : faire passer l’agent public pour un fainéant travaillant au plus quelques maigres heures dans la semaine, et encore, quand il en a envie.

Pour les plus acharnés d’entre eux, le retour aux 39 heures -évidemment, pas payées 39- constituerait un vrai progrès social. Alors, payés à rien faire les fonctionnaires ?

Le dernier travail a peu près sérieux, même s’il est loin d’être exhaustif, a été conduit par Monsieur Philippe LAURENT et a donné lieu à un rapport remis au Gouvernement en mai 2016. Il estime le temps annuel moyen de travail dans toute la Fonction publique à 1584 heures pour une base réglementaire de 1607 heures, soit 1,40/0 inférieur.

Mais, dans le même temps, il observe, comme toute personne de bonne foi peut le faire, que 37% des fonctionnaires travaillent la nuit (contre 26% des salariés du privé), que 18% travaillent le dimanche (pour 15% dans le privé) et que, globalement, les astreintes sont 2 fois plus importantes pour les agents publics.

Il cite d’ailleurs l’exemple du temps de travail théorique des infirmières et infirmiers qui, compte tenu de leurs importantes sujétions, s’établit à 32h30 hebdomadaires. Autrement dit, les fonctionnaires travaillent sur des horaires normaux.

Enfin, « normaux », c’est à voir car, dans la réalité, les mêmes personnels de santé accumulent des dizaines de milliers de jours RTT qu’ils ne peuvent pas prendre, les policiers des heures supplémentaires qui ne leur sont pas payées...!!!

Épisode 4 - Le coût de la fonction publique : alors là, c’est le bouquet !

Trop d’agents publics, trop de masse salariale, trop de dépenses publiques : voilà le mal qui ronge perfidement la société française !

D’abord, rappelons que les administrations publiques ne sont pas qu’un coût. Outre qu’elles participent activement du progrès social, et de l’égalité de traitement du citoyen, elles ont aussi un rôle économique majeur. Elles sont une aide précieuse pour les entreprises, elles ont participé à la création de richesses à hauteur de 20 % du Produit Intérieur Brut en 2015 et à 17% de l’investissement global la même année.

Ensuite, il faut cesser de nous rebattre les oreilles avec de pseudos vérités : le niveau des dépenses publiques n’est nullement un frein économique !

Quelques exemples suffisent à le démontrer. En 2012, le Danemark affichait des dépenses publiques à 59,4% de son PIB davantage donc que la France, le chômage y était de 7%, contre une moyenne de 10,6% dans l’Union Européenne, et la croissance y était 4 fois supérieure à celle de l’UE. La même année, le Portugal avait des dépenses publiques à hauteur de 47,4% du PIB mais le chômage y était de 15,3% et la croissance de -1,4%, c’est-à-dire en récession. Pour lutter contre la crise, les États-Unis ont fait monter leur déficit public à 13% du PIB en 2009, 2010 et 2011 (plus du double de la France sur la même période) et leur taux de chômage a baissé de 2 points.

Quant à l’ensemble des salaires, primes et pensions, versés à tous les ayants droit, il a reculé de 0,5% dans le PIB ces 20 dernières années (soit un peu plus de 10 milliards d’euros en valeur actuelle). Par ailleurs, France Stratégie note que "le niveau de rémunérations par emploi public de la France apparait relativement modérée en comparaison internationale" (Deschard et Le Guilly, 2017, p.12)

Épisode 5 - Trop de dépenses publiques ?

Il est exact que, avec presque 56,5% du PIB, la France a un niveau de dépenses publiques parmi les plus élevés de l’OCDE. Encore faut-il préciser que sur les 11 points d’augmentation dans le PIB intervenus de 1980 à 2017, près de la moitié est concentrée entre 2007 et 2009.

On voit bien la corrélation entre cette hausse et la crise. De fait, une part très importante de la progression de la dépense publique a servi à financer les banques et à fournir des aides au patronat.

Ces dernières, dénommées officiellement « affaires économiques », ont triplé ces 15 dernières années passant de 3,6% des dépenses publiques et 1,9% du PIB à 10,1% des dépenses publiques et 5,7% du PIB. C’est 2,6 points de PIB en plus qu’en Allemagne et 1,4 point que par rapport à la moyenne de l’Union Européenne. Et pourtant, sur la même période, le taux de chômage est passé de 7,9% à 9,4%...

Par ailleurs, ce qu’on appelle tendancieusement les prélèvements obligatoires (voire des "charges") sont souvent de véritables financements socialisés. Par exemple, en France, les dépenses relatives à la retraite et à la santé sont à 90% prises en charge par l’État. Dans bien d’autres pays, ces « services » peuvent être largement confiés au secteur privé mais le poids total des dépenses peut-être tout aussi important qu’en France, voire supérieur.

Exemple : en France, dépenses publiques retraite-santé sont 8 points de PIB plus élevés qu’aux États-Unis, mais les dépenses totales relatives à ces 2 domaines inférieures de 3 points de PIB en France qu’aux États-Unis. Autrement dit, aux États-Unis, soit les personnes individuellement supportent un poids de financement supérieur aux citoyens français (on peut parler alors de « dépenses obligatoires »), soit ils renoncent à une partie de ces droits fondamentaux, d’où un accroissement fort et néfaste des inégalités...