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vendredi 8 décembre 2017

Pourquoi nous ne participerons pas à la journée « Laïcité » de l’Espé Paris le 11 décembre

Communiqué Ferc Sup CGT Paris Sorbonne, CGT Educ’action 75, SNEIP CGT 75, Sgen-CFDT 75, Sud Education 75

Lundi 11 décembre, l’Espé de Paris organise une journée banalisée sur la laïcité qui s’adresse aux étudiant-e-s et inscrite au catalogue des FDF (formation de formateurs). https://www.espe-paris.fr/evenement/journee-laicite-2017

Le programme et l’organisation de cette journée nous posent problème. L’Espé invite seulement deux orateurs polémistes, Philippe Val et Georges Bensoussan (qui a dirigé « Les territoires perdus de la République  » et « la France soumise  »), qui visent à cliver le débat. Loin d’une journée de débats universitaires, qui viserait à former les futur-e-s enseignant-e-s, comme c’est le cas dans les autres Espé, cette matinée nous choque. Nous ne pouvons la cautionner.

Aucune instance de l’Espé n’a été consultée sur le programme : ni le COSP, ni le CE, ni les coordonnateurs de parcours, ni le pilotage du tronc commun… Au lieu d’une véritable journée de formation et d’échanges, impliquant des intervenant-e-s qualifié-e-s, des universitaires de différents points de vue, on assiste à la mise en place d’une opération de communication (de propagande ?) venue d’en haut, qui instrumentalise la question de la laïcité et va favoriser les amalgames.

Voila la vision de Georges Bensoussan à propos des quartiers populaires : « Dans les familles arabes en France, et tout le monde le sait mais personne ne veut le dire, l’antisémitisme, on le tète avec le lait de sa mère ». Il n’hésite pas à reconstruire la réalité, avec une analyse en termes de « clash des civilisations », faisant le jeu du racisme et de l’islamophobie. Il a déjà d’ailleurs été attaqué en justice pour racisme par la LDH, SOS Racisme, la LICRA, le MRAP et le CCIF [1]. Est-ce cette vision caricaturale de la banlieue qu’on veut présenter aux étudiant-e-s, qui pour beaucoup, à l’issue de leur année de stage à Paris, vont enseigner dans les quartiers populaires ?

L’autre orateur, Philippe Val, est lui en campagne médiatique contre le « rouge brunisme », le racisme serait désormais à gauche [2]. Loin d’éclairer les enjeux indispensables pour réfléchir sur un sujet important, sa contribution unilatérale ne pourra qu’alimenter la confusion. Est-ce normal de faire intervenir, comme « formateur », dans un pseudo-débat à sens unique, quelqu’un qui déclarait «  [Les otages français, Christian Chesnot et George Malbrunot] ont été enlevés par des terroristes islamiques qui adorent égorger les Occidentaux, sauf les Français, parce que la politique arabe de la France a des racines profondes qui s’enfoncent jusqu’au régime de Vichy, dont la politique antijuive était déjà, par défaut, une politique arabe.  » [3]

Cette matinée ne peut qu’être une mascarade de réflexion sur la laïcité. Pour nous, elle doit donner lieu à une démarche apaisée, qui respecte la diversité. On ne peut faire abstraction du climat actuel où un ancien ministre de l’Education nationale fait la déclaration suivante sans que cela ne suscite de réaction : « Si on supprimait les 15% de quartiers pourris en France, avec des établissements dans lesquels il y a 98 nationalités, on n’arrive pas à faire cours, eh bien nous serions classés numéro 1 à PISA » ! [4]

La laïcité ne peut stigmatiser une religion, au contraire elle garantie la liberté religieuse, comme la liberté d’opinion, de philosophie. Cette matinée s’inscrit dans un contexte de diabolisation de toute pensée alternative. L’Espé devrait être un lieu de réflexion, d’échange avec une formation ouverte, et non un lieu d’injonction, d’amalgames racistes où le matraquage idéologique remplace la pensée.

Pour toutes ces raisons, nous ne participerons pas à cette matinée, et appelons l’ensemble des étudiant-e-s, enseignant-e-s, personnels à faire de même.