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samedi 16 février 2013

Ce projet de loi n’est pas celui qu’espéraient les personnels

Les contre réformes que sont le Pacte pour la recherche, la loi Liberté et responsabilité des universités (LRU) et l’accession aux Responsabilités et compétences élargies (RCE), conjuguées à la politique d’austérité imposée par les différents gouvernements qui se sont succédés, ont mis l’enseignement supérieur et la recherche à feu et à sang. Les établissements sont mis en difficulté pour exercer correctement leur mission, les personnels n’ont plus les moyens de travailler dans des conditions satisfaisantes et de nombreux étudiants sont acculés à l’échec.

Avec ce projet de loi d’orientation de l’Enseignement supérieur et de la Recherche qui nous est aujourd’hui soumis par la ministre, la nouvelle majorité avait l’opportunité de rompre avec la politique de ses prédécesseurs. C’est hélas la continuité qui a été préférée au changement.

La majorité des structures issues du Pacte pour la recherche restent en place, en particulier l’ANR et son rôle dans la multiplication des appels à projets et le développement d’une forte précarité des personnels, les Fondations de Coopération Scientifique de droit privé, le Commissariat général au Grand emprunt avec ses structures d’ « excellence » et ses IdEx à vocation élitiste. L’AERES change de nom mais son rôle et sa vocation perdurent.

Le principe d’autonomie des universités est maintenu. S’y ajoutera l’acte III de la décentralisation, avec une volonté clairement affichée de régionalisation accélérée de l’Enseignement supérieur et de la Recherche qui s’exprime à travers des contrats de sites où les régions, mais aussi le privé, peuvent être parties prenantes. Pour nous, la mise en place de ces contrats locaux de site doit être mise en relation avec la volonté d’un pilotage par les intérêts du patronat local, comme en témoigne l’insistance du projet de texte à inclure le « transfert des résultats vers le monde socio-économique » comme mission des universités et organismes de recherche.

Le principe des RCE, créateur d’inégalité dans le traitement des personnels, est toujours là et le projet de loi ne fait aucun rappel clair à la responsabilité de l’État et au statut national des personnels. L’application des mesures de promotion peuvent dépendre de la situation des universités et du bon vouloir des directions, notamment si le GVT n’est pas pris en compte au niveau national. Ajoutons que ces disparités qui vont en s’accroissant, constituent désormais un frein à la mutation volontaire des personnels, Biatoss et enseignants-chercheurs, dans le cadre de l’autonomie des établissements. Le basculement de l’habilitation vers l’accréditation, que nous refusons, va aussi accentuer le principe d’autonomie aux dépens des capacités de régulation de l’État et de contrôle du CNESER.

Il est significatif que les organismes de recherche n’apparaissent quasiment pas dans le projet de loi, et y soient uniquement considérés via les Communautés d’Universités. Cela laisse supposer que ce gouvernement souhaite les maintenir dans un rôle de supplétifs des universités, comme le voulait déjà le gouvernement précédent. La fusion du CNESER et du CSRT n’infirme pas cette hypothèse.

La philosophie générale du texte se lit également à travers l’annonce des budgets des établissements et organismes. Ces budgets sont calqués sur ceux de 2012 qui étaient au plus bas suite aux coupes drastiques des gouvernements Sarkzoy. Alors que les discours de la ministre prétendaient affirmer la volonté de ré-équilibrer le soutien de base des unités par rapport au financement sur appels à projets, la réalité est là : dans le meilleur des cas, le budget récurrent 2013 des unités stagne alors que l’ANR, même légèrement émoussée, continue à lancer ses appels à projets.

Enfin, le projet exclut tout élément de programmation et, conformément aux objectifs de la MAP (nouvelle RGPP), ne manifeste aucune intention du ministère en matière d’augmentation du budget et de postes. Comment, dans ces conditions, peut-on espérer résorber la précarité dans l’Enseignement supérieur et la Recherche ? La FERC Sup CGT rappelle qu’elle réclame un plan d’intégration de tous les personnels non-titulaires sur fonctions pérennes, comme cela c’est déjà fait à plusieurs reprises dans le passé. La situation de l’emploi est catastrophique dans nos établissements et c’est un véritable plan social qui est à l’œuvre dans notre secteur : le CNRS a supprimé en 4 ans 1300 postes (titulaires et contractuels sur subvention d’État) et les universités sont contraintes de geler des centaines de postes, probablement plus de 1500. Par ailleurs, nous craignons que la conjugaison de la modulation du service des enseignants-chercheurs - que nous refusons toujours - et de l’usage systématique du numérique imposé aux établissements n’ait d’autre but que réduire l’emploi enseignant au prétexte d’un temps de face à face pédagogique trop important dans les établissements français.

En prenant la décision de refuser de remettre en cause la loi LRU et le Pacte Recherche, ainsi que les mesures et structures qui en sont issues, ce gouvernement prend la responsabilité d’amplifier les effets de la politique mise en œuvre par les gouvernements Sarkozy auxquels vont s’ajouter ceux, aussi dévastateurs, de la décentralisation et de la régionalisation de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

Ce projet ne répond ni aux attentes des personnels, ni aux intérêts des usagers et de la Nation. Aucune des revendications portées par les luttes des personnels et des étudiants en 2007 et 2009 n’est reprise par ce projet de loi. La voix des personnels n’est pas entendue.
D’ailleurs les assises, telles qu’elles ont été organisées par le ministère, ont permis de noyer la parole des personnels et de leurs organisations syndicales représentatives afin de la rendre inaudible. La méthode de pseudo-concertation avec les organisations syndicales qui a suivi a largement confirmé cette volonté.

Ce projet de loi n’est pas celui qu’espéraient les personnels. Il doit être abandonné et laisser la place à de véritables négociations avec les organisations syndicales représentatives en partant du principe que la loi LRU et le Pacte pour la Recherche sont préalablement abrogés pour permettre l’élaboration d’un nouveau mode d’organisation et de fonctionnement de l’Enseignement supérieur et de la Recherche dans notre pays.

La FERC Sup CGT ne proposera ni ne discutera des amendements, pas plus qu’elle ne votera pour ce projet car une nouvelle loi qui ne remettrait pas en cause la loi LRU et le Pacte pour la recherche ne peut qu’amplifier le processus destructeur du Service public d’Enseignement supérieur et de Recherche engagé par les gouvernements précédents et reviendrait donc, par là même, à affirmer que la loi LRU et le Pacte pour la recherche constituaient la bonne réponse pour la communauté universitaire et scientifique. Ce qui est loin d’être le cas !

Conseil national de l’Union FERC Sup CGT, le 15 février 2013